Pourquoi et comment les entrepreneurs doivent-ils se libérer de la technologie pour mieux l’intégrer ?

La question est loin d’être anodine alors que les offres aux créateurs d’entreprise n’ont jamais été aussi nombreuses et variées. Le marché que représente les créateurs avoisine pour les 2 seules premières années les 2,5 milliards d’Euro. Un joli potentiel d’affaire alors que la consommation grand public patine. En plus, l’immense majorité des créateurs (70% en fait) se lance sans préparation ni formation à ce nouveau métier d’entrepreneur qui comprend le non moins difficile métier d’acheteur.

L’offre est immense entre les logiciels de comptabilité en ligne hyper simple, de CRM (gestion relation client) follement pratique, d’emailing automatisé superbement puissant, la publication web immensément facilitée. Derrière ces offres comment faire la part entre la startup qui se lance avec un outil qui n’est pas vraiment finalisé (c’est l’expérience des clients qui permet précisément de s’ajuster) et la solution qui tient la route mais … est une vraie usine à gaz.

Il se trouve que la grande découverte des créateurs est qu’un outil, ne fait rien tout seul.

Donc, il s’agit de choisir l’option qui va nous manger tout notre temps pour la maîtriser soi-même ou … le budget pour financer la ressource humaine qui va s’en charger n’est pas anodin. Ici je vais mettre 3 mois d’apprentissage à l’outil en question (et donc pendant ce temps-là « manger » ma trésorerie et ne pas prospecter ou produire. Là, je vais prévoir dans mon plan de financement de financer celui ou celle qui pilotera l’outil. La compétence du créateur est donc au cœur d’une logique économique qu’il n’aborde que trop rarement. Pourquoi donc ?

On peut toujours dire que c’est la faute du système. Que les publicités nous racontent des histoires sur la facilité magique de la technologie. Que l’accompagnement entrepreneurial n’est pas assez poussé ou professionnalisé. Tout ceci n’est pas faux.

Le vrai sujet tient en fait que l’ex-salarié qui est aussi un consommateur souvent bien conditionné, ne prends pas le temps de quitter cette posture subordonnée pour entrer dans celle du patron-responsable-acteur de ses propres choix, ce qui est le côté formidable de l’entrepreneuriat.

Déjà en 2010, le rapport du DG de l’APCE (Agence pour la création d’entreprise) pointait du doigt que le créateur français était pour l’immense majorité un salarié déçu. Déçu de ne pas trouver un emploi ou de ne pas trouver un management qui fasse la place à la reconnaissance, le sens ou l’autonomie auquel il aspire. Tous les accompagnants à la création d’entreprise savent bien que ceci n’a pas changé…

Or, c’est un levier légitime et même formidable que d’aspirer à prendre en main sa vie professionnelle, fusse sous la contrainte d’une recherche salariée infructueuse.

Mais le mythe de la technologie qui faciliterait tout (la première page de Google qui ouvrirait les portes toutes les richesses en est le premier) s’immisce même de ces créations.

Plus est forte cette insatisfaction, plus la personne se précipite vers la solution apparemment simple qui pourrait la faire sortir de son imbroglio personnel et professionnel. Tous les psychologues savent bien qu’il faut avoir fait son deuil d’un choc ou d’un désappointement quel qu’il soit pour recouvrer pleinement ses facultés de discernement, de créativité et de décision lucide.

Tous les créateurs qui ont une première année d’exploitation l’ont constaté par l’expérience. Non ce n’est pas si simple. Le choix du statut facilité, les aides financières qui facilitent le lancement et la technologie simple et facile sont des sirènes auprès desquelles tous les entrepreneurs ne sont pas obligés d’aller nager. En prendre conscience c’est faire un premier acte de management du budget temps, budget-énergie, budget-finances et se rendre maître d’une technologie qui doit servir et non asservir.

Le choix d’une solution technique, parce qu’elle engage le fonctionnement d’une entreprise et donc réponds ou non aux besoins d’une ou de plusieurs personnes, ne peut se suffire des seules promesses tournant généralement autour de la même offre « C’est facile vous verrez, ça marchera automatiquement et vous serez libre de vaquer à vos clients »…

Non, ce n’est pas possible de demeurer tel le consommateur moyen de supermarché qui achète par impulsion. L’entrepreneur doit devenir véritablement un bon acheteur. Bien connaître ses besoins véritables (personnels et professionnels) ce qui prend du temps. Ce qui demande de savoir aller vers d’autres créateurs pour partager leur expérience.  Ce qui demande de la curiosité et une certaine humilité. Ce qui demande de savoir s’appuyer sur un dispositif d’accompagnement à la création professionnel, un véritable coaching entrepreneurial (au sens de la fédération pro www.fnpae.org)  qui prend en compte ces dimensions formation personnelle et professionnelle.

La promesse technologique deviendra réalité en s’affranchissant du mythe de la facilité pour tous. Entreprendre est complexe, entreprendre se prépare et se réfléchi, entreprendre est difficile mais tellement possible et passionnant dès qu’on aborde son projet le plus longtemps possible avant de démarrer.

Piloter la mise en place d’une solution technique ressemble étonnement au pilotage d’un projet entrepreneurial. Quel est mon besoin réel, mes objectifs et les moyens que j’y consacre ? Cela demande de s’asseoir, prendre son temps, faire marcher sa tête, travailler avec un professionnel qui n’est pas le vendeur de la solution et partager son expérience avec celles et ceux qui sont légitimes pour le faire.

On est un peu loin du clic-à-tout-faire et c’est bien ce qui rend l’aventure entrepreneuriale passionnante !