Parmis les 15 alternatives de modèles entrepreneuriaux du BCAE (www.bcae.fr) il existe le choix du « modèle  existant  ou  innovant voir de rupture ».

Les contingences de l’innovation sont très particulières et méritent de s’arrêter notamment sur un point souvent occulté.

 

La France est championne des bonnes idées, c’est bien connu. Un bon pilotage technique, des bonnes aides financières à l’entrepreneuriat encourageraient la concrétisation des idées en fonction de leur puissance. C’est le mythe actuel. Les financements et les réseaux qui viennent aider l’innovation n’ont jamais été aussi nombreux en France. Or, la pérennité n’est pas si bonne et il y a même des start-up qui filent dans la Silicon Valley.

Alors que se passe-t-il ?

 

Ce n’est pas une bonne idée (technologique ou non) qui fait la réussite d’une entreprise, c’est la qualité de son exécution et sa transcription économique.

 

Dans cet exercice le porteur de projet, fut il à la fois génial dans son projet et excellent gestionnaire manager dans ses postes précédents, va devoir faire face à des tensions permanentes entre le désir de se projeter et la nécessité de réaliser au quotidien pour conforter les investisseurs (dont il doit être le premier d’ailleurs). Ces tiraillements vont l’épuiser lui-même ou épuiser la qualité de son exécution voire le faire renoncer.

 

L’entrepreneur-innovateur doit donc s’adjoindre un(e) associé(e) qui prennent en responsabilité le quotidien de cette qualité d’exécution. Associé il doit l’être, car le fait d’avoir investi de l’argent et d’en espérer un retour est un formidable levier de l’efficacité professionnelle. Cet associé doit être impliqué au quotidien également (ce qui le diffère du Business Angels) car les tensions créatrices et réalisatrices sont très fortes dans un monde où les décisions se prennent très et souvent trop vite.

 

En concentrant chaque associé sur la cohérence pour l’un de sa vision et de sa stratégie et, pour l’autre, la cohérence de l’exécution avec la stratégie, le binôme réussi l’extraordinaire défi de la schizophrénie heureuse.

 

Ce fonctionnement est également le facteur de prévention des risques psychosociaux. L’innovateur portée par son idée qui lui apporte toute l’énergie et la capacité de déclencher intelligence et relationnel, ne peut porter seul les allers-et-retours avec le réel sans risquer un épuisement d’autant plus fort que l’idée est de rupture et les moyens en sa possession sont encore limités au début.

Les capitaux-risqueurs le savent bien quand ils demandent à l’entrepreneur innovant d’avoir au préalable convaincu un associé. Celui-ci prendra le risque de croire à la fois en l’idée et sa propre capacité à la mettre en œuvre.

Or, le créateur innovateur est dans cette tension très forte de vouloir mettre en œuvre sa belle idée, donc d’avancer vite et seul, alors qu’il doit attendre de la mettre en perspective opérationnelle, gage de la qualité de réalisation attendue par tout investisseur.

C’est toute la qualité de l’accompagnement entrepreneurial qui se joue ici, en mettant face au porteur de projet, non pas des conseillers tout prêts à l’encourager et l’aider, mais des coachs véritables en capacité, lors d’un bilan de compétences entrepreneuriales indispensable, de faire basculer « l’innovateur qui a besoin d’une entreprise pour réaliser son idée » en « entrepreneur qui se met au service d’une idée pour produire du résultat ».

 

Cet associé doit donc arriver soit à la genèse du projet soit au démarrage de l’entreprise sans quoi le risque est immense de se retrouver face à une organisation qui tel un plat de nouille, devient difficilement transmissible à un tiers.

 

Tête dans les étoiles et pieds sur terre. Schizophrénie heureuse pour un solo qui démarre juste, mais si douloureuse quand le réel de la trésorerie se rappelle au souvenir de l’entrepreneur exténué.

L’exigence de l’association se confronte au mythe de la toute-puissance entrepreneuriale. C’est un autre chapitre que traite l’un des volets du BCAE.